Le burn out, un nouveau mal du siècle, en attente de reconnaissance

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Par AFP
Publié le 15 février 2017 - 16:50
Mis à jour le 18 février 2017 - 10:00
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Le burn out, ou syndrome d'épuisement professionnel, que des députés souhaitent voir mieux reconnu, n'est pas défini médicalement mais il recouvre des situations de souffrance psychique bien réelles, mal évaluées et prises en charge en France, selon des spécialistes.

"C'est un concept mal cerné qui ne figure dans aucune classification des troubles mentaux ou de maladies et donne lieu à toutes les approximations possibles", dit à l'AFP le psychiatre Patrick Légeron, co-auteur d'un rapport sur le sujet pour l'Académie de médecine en 2016 et pionnier des pathologies du stress liées au travail.

"Or, comment reconnaître en maladie professionnelle quelque chose qui n'est pas reconnu comme maladie ? En revanche, on peut reconnaître des pathologies mentales comme maladies professionnelles", ajoute-t-il.

Le Dr Légeron évoque de nombreux patients "en dépression par épuisement occasionné par le travail" qui viennent le consulter à l'hôpital Sainte-Anne à Paris. Et il déplore "le retard" de la France en matière de prévention et de prise en charge, comparé aux pays d'Europe du Nord, la Suède et le Danemark notamment.

"La souffrance psychique au travail est une réalité grandissante dans notre pays ", confirme Gérard Sebaoun, député PS du Val-d’Oise, et médecin, rapporteur d'une mission d'information sur le sujet qui reconnaît "les difficultés encore à prendre en compte cette nouvelle souffrance psychique et notamment à la prévenir".

Si le mot burn out est passé dans le langage courant, on ignore cependant le nombre précis de travailleurs touchés, "des dizaines de milliers, voire des centaines de milliers de personnes", selon M. Sebaoun.

En 2015, l'Institut de veille sanitaire (Invs) devenu Santé Publique France, le chiffrait à 30.000 en se basant sur des données recueillies entre 2007 et 2012, soit 7% des 480.000 pathologies mentales liées au travail.

- Facture économique -

Le cabinet Technologia, spécialisé dans la prévention des risques psychosociaux (RPS) avait estimé en 2014 à "environ trois millions" le nombre d'actifs "exposés à un risque élevé d'épuisement professionnel".

Pour remédier au problème, son directeur, Jean-Claude Delgènes, réclame "des statistiques précises, une traçabilité et du dialogue dans les entreprises".

"Aujourd'hui, déplore-t-il, le système est bancal car dès qu'il y a une maladie avec forte présomption d'imputation professionnelle, elle n'est pas reconnue comme telle. On considère qu'il s'agit d'une fragilité individuelle. On n'en parle pas dans l'entreprise, on ne recherche pas les causes" et la prise en charge des soins "est du ressort du régime général de l'assurance maladie", explique-t-il à l'AFP.

Son coût économique et social est "astronomique" pour la collectivité, rappelle la mission parlementaire. L'organisation internationale du travail (OIT) chiffrait en 2012 entre 3 et 4% du PIB des pays industrialisés, le coût des effets négatifs du stress, "dont le burn out est l'ultime phase", dit le Dr Légeron.

Comme d'autres professionnels, M. Delgènes réclame l'abaissement du "taux d'incapacité permanente partielle" (IPP), seul critère qui permet aujourd'hui de voir un dossier de burn out pris en compte par les commissions chargées de reconnaitre les maladies professionnelles.

Il est actuellement de 25% "et la très grande majorité des dossiers sont écartés d'office". Les députés proposent 10%, voire sa suppression à terme.

Si le burn out est reconnu comme maladie professionelle, ce que souhaite le candidat PS à la présidentielle Benoît Hamon, les entreprises devront financer sa prise en charge, au titre du régime d'indemnisation des personnes victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles (AT-MP).

Le Dr Légeron suggère aussi de "faire payer aux entreprises les dégâts qu'elles occasionnent sur la santé de leurs salariés".

Il évoque les Etats-Unis: "Les mutuelles, qui en avaient marre de payer plein pot les dégâts de troubles musculo-squelettiques (TMS), ont appliqué un bonus-malus aux entreprises qui ont dû cotiser plus. Résultat: les TMS ont chuté d'un seul coup".

Outre les contraintes légales qui pèsent aussi sur l'employeur qui négligerait la santé physique et mentale de ses salariés, il propose des mesures "incitatives" basées sur les modèles en matière d'environnement: une défiscalisation et une labellisation pour les entreprises modèles.

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