L’ONU annonce la création d’une "armée digitale" pour lutter contre une "désinformation meurtrière"

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France-Soir
Publié le 25 août 2023 - 12:00
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Photo de Daryan Shamkhali sur unsplash.com
Le siège de l'ONU, à New York, États-Unis.
Photo de Daryan Shamkhali sur unsplash.com

INFORMATION - Faisant de "la lutte contre la désinformation" en ligne "une priorité absolue", les Nations Unies (ONU) ne se contentent plus de discours ou de résolutions sur "la prolifération de la haine et des mensonges" sur les réseaux sociaux. L'organisation intergouvernementale a annoncé ce mois-ci la création d’une "armée digitale", composée de "soldats de la paix" qui "luttent contre la désinformation meurtrière". Déployée par les casques bleus à travers le monde, cette armée devrait "détecter les fausses informations" qui visent à "saper des faits scientifiquement établis" liés à la pandémie de Covid-19 ou au réchauffement climatique, selon les récents dires du Secrétaire général (SG) de l’ONU Antonio Guterres.

Depuis 2020 et la crise du Covid-19, les appels de l’ONU à lutter contre la désinformation se sont multipliés. Déjà en 2019, "la mission des Nations Unies en République démocratique du Congo (RDC) - connue sous son acronyme MONUSCO - a exprimé de graves inquiétudes concernant les campagnes de désinformation sur les réseaux sociaux appelant à la violence contre les soldats de maintien de la paix", rappelle-t-on.

Antonio Guterres a fait de la lutte contre ce phénomène une "priorité absolue", appelant dès avril 2020 à "rejeter les mensonges et les inepties sur le coronavirus". Au fil des mois et des événements, le SG des Nations Unies alertait sans cesse contre "la prolifération de la haine et des mensonges en ligne", qui provoquent, affirme-t-il, "de graves dommages au niveau mondial". "Cela alimente les conflits, la mort et la destruction. Cela menace la démocratie et les droits humains", estime-t-il, remettant en cause le rôle des "plateformes numériques".

"Pas de définition universellement acceptée de la désinformation"

Si les réseaux sociaux "ont transformé les interactions sociales, culturelles et politiques partout dans le monde" en "connectant les citoyens sur des questions importantes", ces plateformes ont également "exposé un côté plus sombre de l’écosystème numérique. Elles ont permis la propagation rapide des mensonges et de la haine, causant de réels dégâts à l'échelle mondiale".

Dans une note diffusée sur le site internet de l’organisation, Guterres, tout en admettant qu’il "n'existe pas de définition universellement acceptée de la désinformation", rappelle que celle-ci peut "survenir dans des contextes variés et complexes, comme le processus électoral, la santé publique, les conflits armés ou le changement climatique", avec pour objectif de "tromper" et "causer un préjudice grave". "Elle peut être diffusée par des acteurs étatiques ou non-étatiques, affecter un vaste éventail de droits fondamentaux, saper la réponse des politiques publiques ou encore amplifier les tensions en période d'urgence ou de conflit armé", a-t-il écrit.

En juin 2023, le SG des Nations Unies est encore revenu à la charge, exprimant leur volonté d'intensifier la lutte contre la "prolifération de la désinformation". La multiplication de nouveaux outils d’intelligence artificielle (IA) suscitait à ce moment-là une profonde inquiétude mais Antonio Guterres insistait sur le "risque existentiel" de la désinformation en ligne à ses yeux, proposant un "code de conduite international".

"La capacité de disséminer à large échelle de la désinformation pour saper des faits scientifiquement établis pose un risque existentiel à l’humanité", a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse, citant comme exemples les risques de violences, les fausses informations véhiculées d'après lui lors de la pandémie de Covid-19 ou encore la propagation de thèses niant la responsabilité de l’humanité dans le changement climatique. "Ces risques se sont encore intensifiés à cause de l’avancée rapide de la technologie, comme l’intelligence artificielle générative", qui permet notamment de créer des deepfakes (des enregistrements vidéo ou audio réalisés ou modifiés grâce à l'IA).

Une "armée" dotée de smartphones, collaboration avec Big Tech

Dans un communiqué de presse publié le 19 août dernier, l’ONU explique le "statu quo n’est pas une option". L'organisation annonce ainsi la mise en place d’une "armée digitale" pour lutter contre une "désinformation meurtrière". "Les soldats de la paix de l'ONU mettent de nouveaux outils entre les mains des civils de tous âges", y compris des personnes encore mineures.

Comment cette "armée" va-t-elle procéder ? Les Nations Unies précisent que leurs "soldats" seront chargés de "détecter des fausses informations" et produire des contenus à l’aide de leurs smartphones et des applications adaptées. Ces contenus, que l’ONU qualifie "d’informations objectives et crédibles", seront diffusés à travers des "clubs relais" qui se chargent de les partager sur les réseaux sociaux. Les "soldats" de cette "armée digitale" seront formés lors d’ateliers animés par les casques bleus, dont certains ont déjà eu lieu en République démocratique du Congo (RDC).

Il ne s’agit pas de la première mesure prise par les Nations Unies pour lutter contre la désinformation. Ce mois-ci, une station de radio visant à "contrer les discours de haine" et les "fake news" (fausses nouvelles) a été lancée à Abiyé au Soudan. Le Programme pour le développement (PNUD) a déployé cette année un outil automatisé de fact-checking (vérification des faits) baptisé "iVerify".

Basée sur l’Intelligence Artificielle, cette solution a été développée en collaboration avec des organisations médiatiques comme International Fact-Checking Network et des géants du numérique comme le groupe Meta. L'ouil "iVerify" a jusque-là été utilisé en Zambie et au Honduras lors d’élections générales, pour lutter, selon l’ONU, contre "la propagation de faux récits pendant les périodes électorales".

Si l'IA, la désinformation en ligne ou le discours de haine sur les réseaux sociaux suscitent des inquiétudes tant chez les acteurs étatiques que non étatiques, cette "armée digitale" onusienne ne rassure pas tout le monde.

Parmi les domaines dans lesquels cette "désinformation" est censée surgir, cités par Antonio Guterres, figurent justement les questions liées au coronavirus ou encore le réchauffement climatique. Des thématiques complexes qui nécessitent des débats, qui évoluent régulièrement avec l'état de la science : certains craignent ainsi des phénomènes de censure.

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