Plumes et duvets des palmipèdes : une souffrance tolérée ?

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Lalia Andasmas, édité par la rédaction.
Publié le 25 janvier 2018 - 15:44
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Une oie après s'être fait arracher les plumes.
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Deux types d'arrachage des plumes et des duvets existent: la première a lieu sur des animaux morts tandis que la deuxième s'effectue sur des animaux vivants.
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Les plumes et duvets des palmipèdes sont utilisés pour la fabrication d'articles de literie, de sacs de couchage ou encore de doudounes mais leur production reste souvent liée à une grande souffrance animale. En dépit d'une interdiction, le plumage à vif serait toujours utilisé en France comme le rappelle pour "France-Soir" Lalia Andasmas, juriste spécialisée dans le droit animalier.

Les palmipèdes sont des animaux domestiques ayant le statut d'être vivant doué de sensibilité[1] et se voient donc accorder la protection du droit pénal. Le foie gras n'est pas la seule source d'exploitation des oies et des canards, leurs plumes et duvets intéressent également l'homme. En effet, ils servent à la fabrication d'articles de literie, de sacs de couchage ou encore de doudounes.

Deux types d'arrachage des plumes et des duvets existent. La première a lieu sur des animaux morts alors que la deuxième s'effectue sur des animaux vivants. Les associations de protection animale ont mis en avant la souffrance endurée par les palmipèdes lorsqu'ils sont plumés vivants. Vier Pfoten[2] a notamment mis l'accent sur le fait qu'en cinq heures, un ouvrier hongrois plume environ 3.000 animaux, provoquant ainsi des souffrances et blessures importantes.

En France, seul l'arrachage sur les animaux morts est autorisé[3] mais le plumage à vif, méthode standard dans les principaux pays producteurs (Chine, Hongrie, Pologne), se pratiquerait toujours. Ainsi, un éleveur a indiqué à 30 millions d'amis qu'avec la méthode autorisée, "la qualité des plumes" était "nettement moins bonne[4]". C'est donc la raison pour laquelle il ne souhaite pas utiliser la méthode légale.

A lire aussi - Gavage des palmipèdes et souffrances animales: quelles sont les règles

Dans l'Union européenne, aucune disposition spécifique ne vise les plumes et les duvets des palmipèdes, ce sont les dispositions générales de la directive communautaire 98/58 du 20 juillet 1998[5] concernant la protection des animaux dans les élevages qui s'appliquent[6]. Néanmoins, les Etats membres et la communauté ont ratifié la convention européenne sur la protection des animaux dans les élevages du 10 mars 1976[7]. Ainsi, la France est tenue de respecter la recommandation sur les oies domestiques du 22 juin 1999 qui dispose dans son article 23-3 que "les plumes, y compris le duvet ne doivent pas être arrachés sur des oiseaux vivants[8]". Toutefois, cette disposition ne s'applique pas à l'importation des produits d'origine animale ce qui pose de réels problèmes de concurrence et d'éthique.

Se pose la question de savoir s'il ne devient pas urgent d'interdire l'arrachage des plumes et des duvets afin évidemment d'éviter des souffrances et douleurs inutiles. Mais aussi des tromperies sur la marchandise d'autant que des produits de substitutions existent et sont tout aussi doux.

Le fondement juridique pourrait être le bien-être animal car il parait difficile d'améliorer l'arrachage des plumes et des duvets sur un animal vivant ou encore le statut d'animal vivant doué de sensibilité. Il semble impossible de concilier une telle pratique et ce statut juridique de l'animal.


[1]Jean-Pierre Marguénaud, L'entrée en vigueur de "l'amendement Glavany": un grand pas de plus vers la personnalité juridique des animaux. Revue Semestrielle de Droit Animalier 2/2014, p. 15 et s. http://www.unilim.fr/omij/files/2015/04/RSDA-2-2014.pdf

[3]Sans toutefois être inexistante dans la mesure où l'arrachage sur les animaux vivants s'avère plus rentable et les sanctions sont absentes. Cf. Question écrite avec réponse n° 66819, 21 octobre 2014, Mme Laurence Abeille au ministère de l'Agriculture, de l'Agroalimentaire et de la Forêt.

[6]Cette directive a été transposée en France par l'arrêté du 30 mars 2000 modifiant l'arrêté du 25 octobre 1982 relatif à l'élevage, la garde et la détention des animaux. L'article 1er de cet arrêté dispose: "Les animaux élevés ou détenus pour la production d'aliments et ceux qui leur sont assimilés doivent être maintenus en bon état de santé et d'entretien conformément à l'annexe I du présent arrêté". Par conséquent les plumes et duvet ne sont pas visés. https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=5E0184F9B19F5C67E692C6E6C2095230.tplgfr41s_2?cidTexte=JORFTEXT000000581701&categorieLien=i

[8]Recommandation concernant les oies domestiques (anser anser f. domesticus, anser cygnoides f. domesticus) et leurs croisements adopté par le Comité Permanent de la Convention européenne sur la protection des animaux dans les élevages (T-AP) le 22 juin 1999.

 

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