France Télévisions : Début du vote d'une motion contre Ernotte
La patronne de France Télévisions, Delphine Ernotte, pourrait subir mardi un camouflet avec le vote d'une motion de défiance des journalistes qui contestent des économies que pourrait faire l'audiovisuel public et s'inquiètent d'un projet de réforme préparé par le gouvernement.
Les 700 journalistes des rédactions nationales du groupe (France 2 et 3, franceinfo...) ont commencé à voter. Ils doivent se prononcer à l'appel de leurs SDJ sur la question suivante: "Faites-vous confiance à Delphine Ernotte-Cunci pour préserver la qualité et les moyens de l'information à France Télévisions ?".
Pour les SDJ, ce scrutin, dont les résultats seront connus en début de soirée, vise à dénoncer "une attaque inédite contre l'information du service public". La présidente de France Télévisions a assuré prendre ce vote "au sérieux", dans un message adressé aux salariés.
Si les "non" l'emportaient, ce serait un camouflet pour Delphine Ernotte, qui a pris les rênes du groupe public en 2015 et a été fortement critiquée, notamment lors du remplacement de David Pujadas par Anne-Sophie Lapix aux manettes du 20H de France 2.
Sommée par le gouvernement de réduire de 50 millions les dépenses du groupe en 2018, à 2,57 milliards d'euros, la direction du groupe veut supprimer 180 postes équivalent temps plein (ETP) l'an prochain via des non-remplacements de départs à la retraite, dont 30 dans l'information. Elle voulait en outre réduire drastiquement la diffusion des magazines emblématiques de France 2, "Envoyé Spécial" et "Complément d'enquête", mais y a renoncé face au tollé provoqué.
"Des magazines d'investigation fragilisés, des journaux réduits ou menacés de disparition, un service des sports qui pourrait, pour la première fois, renoncer à diffuser les JO, une chaîne d'information et un site internet sous-dotés, des CDD remerciés sans ménagement… La situation est intenable", affirment les SDJ.
"Nous comprenons la nécessité de faire des économies. Mais demain, avec les coupes budgétaires envisagées par une présidence sans vision stratégique, les équipes ne seront plus en mesure de vous proposer une information de qualité, digne du service public, indépendante et vérifiée", avertissent-elles.
- Grève mercredi -
"Je sais combien certains chantiers peuvent être difficiles, mais ils sont nécessaires", a plaidé de son côté Delphine Ernotte, dans son message aux salariés.
"Si l'information reste l'une des priorités du groupe, elle ne peut pas être exonérée des efforts d'économies que nous devons tous faire. Je prends au sérieux la mise au vote d'une motion de défiance. Elle témoigne d'une inquiétude réelle et d'une demande d'équité dans la répartition des efforts. Nous y serons vigilants et attentifs", a ajouté la dirigeante.
Autre signe de la forte agitation au sein de France Télévisions, trois syndicats, la CGT, FO et le Syndicat national des journalistes (SNJ) ont appelé l'ensemble des salariés du groupe à une grève de vingt-quatre heures mercredi, à l'occasion de la tenue d'un Comité central d'entreprise.
Ils veulent ainsi contester non seulement les économies prévues en 2018, mais aussi un projet de réforme en profondeur de l'audiovisuel public, préparé par le gouvernement et qui les inquiète au plus haut point.
Cet automne, la révélation de "pistes de travail" radicales émanant du ministère de la Culture, évoquant un "rapprochement" entre France Télévisions et Radio France, une fusion de France 3 et France Bleu, la suppression de France Ô ou le passage de France 4 à une diffusion 100% numérique, a déclenché la colère des syndicats qui y voient le risque d'une destruction du service public.
Des propos très sévères du président Emmanuel Macron envers l'audiovisuel public, tenus la semaine dernière devant des parlementaires, ont fait monter encore d'un cran la tension.
Les patrons de l'audiovisuel public doivent présenter des propositions communes à la ministre de la Culture Françoise Nyssen le 21 décembre. Cette dernière remettra ensuite ses recommandations à l'exécutif, en vue d'une décision en février ou mars.
Il ne s'agit pas "de supprimer, de fusionner" mais de "réfléchir" à "des synergies et des coopérations", s'est défendue la ministre lundi soir.
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